Pour me placer en cohérence avec le thème du cycle, j’ai choisi de me rendre sur les lieux de la vie nocturne qui avaient leur importance pour moi avant la crise sanitaire. La vraie interrogation est de savoir si ces lieux pourront reprendre le rythme qui était le leur avant le COVID - celui de la culture et de la contre-culture nocturne. Pour reprendre les mots par Vincent Carry, « Au delà de son rôle artistique qui fait peu débat quant à sa place historique, ce qui est encore plus triste, c'est le manque de perception du rôle social et démocratique de l'espace de la nuit. »
Depuis le printemps 2020, c’est tout un pan de la culture qui est mis à l’arrêt ; pourra-t-il se relever ? Je l’espère grandement ! Cette série est une forme d’hommage et de soutien envers ces nœuds de la vie urbaine. Selon moi, l’espace de la nuit est un espace démocratique dont le rôle - notamment auprès de la jeunesse - ne devrait pas être négligé par le gouvernement et en premier lieu par le Ministère de la Culture.
Les photographies ont été prises de nuit au film argentique ultra-sensible, entre 22h00 et 02h00 du matin, créneau durant lequel je sortais dans le « monde d’avant », en cohérence avec mon rythme de vie. Elles ont été réalisées durant une dérive, pratique déambulatoire chère aux situationnistes, et que j’exerce depuis mes débuts. Le rendu est sombre, granuleux et les lieux parfois méconnaissables. Mais que dire de cette période vécue par les acteurs du monde de la nuit ?
Il s’agit ici d’un coup d’un soir : une pellicule, une quinzaine de kilomètres parcourus, aucune rencontre dans un Paris quasiment désert, Bashung avec moi dans les oreilles...